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L'Agba News
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25 novembre 2006

Harbate lbeghla !

lbeghla« harbate lbeghla ! ». Dès que cette maudite phrase était prononcée, des flots de honte se déversaient sur notre orgueil de mâles. C’est que nous savions pertinemment que chaque escapade de ce satané quadrupède, donnait suite à plusieurs jours de railleries et moqueries.

Comme toute ferme qui se respecte, la nôtre abritait un beau cheval. Certes il n’avait rien d’un pur sang, ni même de ces beaux spécimens de tbourida, mais c’était quand même un joli Kidar, élancé, fier et rapide comme l’éclair. Il coula des jours paisibles à la ferme, jusqu’à ce que mon oncle Mustapha aie la mauvaise idée de nous offrir, mes frères et moi, une véritable selle en cuir qu’il tenait d’un couple de français amateurs d’équitation.

Le pauvre kidar se transforma du jour au lendemain en cheval de course. Nous le baptisâmes Coco, le bichonnâmes, l’entraînâmes et passâmes nos journées à chronométrer nos traversées de la ferme au galop. Coco prit goût à son nouveau statut et surtout aux morceaux de sucre qui récompensaient chacun de ses efforts. Il en oublia qu’il était toujours le Kidar de la ferme, assujetti de ce fait à tirer le vieux chariot. Il galopa un jour funeste ou il ne devait que trotter, renversa le lourd chariot chargé de bottes de foin, manquant tuer deux ouvriers.

Nous fûmes sévèrement réprimandés. Le pauvre Coco, quant à lui, ne passa même pas la nuit. Il fût conduit séance tenante chez Lmaati moul lebghal, qui l’échangea contre une gigantesque mule blanche, dont le regard faussement endormi cachait parfaitement une incroyable sournoiserie. 

Cette maligne s’appliqua à donner totale satisfaction les premiers jours. Elle tira le vieux chariot avec la lenteur requise, contribua à tirer le vieux tracteur quand il refusait de démarrer, évita soigneusement le potager de ma mère et lutta vaillamment contre toutes ses envies de coup de pied. Ses lenteurs – calculées je vous dis – séduisaient là où la fougue du pauvre Coco exaspérait. Lmaati fût généreusement remercié pour son aide et la mule élit définitivement domicile dans notre étable. Nous n’allions pas tarder à nous en mordre les doigts.

Un beau matin cette dévergondée rompit la fine corde qui la liait et nous offrit une éloquente démonstration de son art. Elle galopa plus vite que ne l’aurait jamais fait Coco, s’ébroua, hennit, déjoua toutes nos tentatives pour l’attraper, donna des coups de pieds dans l’air, se cabra … ma quessratche quoi ! Pour finir, elle fonça vers une ouverture qu’elle avait repérée dans la haie délimitant la ferme et disparut dans la nature.

Nous la cherchâmes une bonne partie de la journée, jusqu’à ce qu’un lointain voisin vienne, la moustache moqueuse, nous informer que notre fugitive était chez Oulad Fateh, une dizaine de kilomètres plus loin. C’est quand nous partîmes la chercher que nous mesurâmes toute l’étendue de notre déshonneur. Ô rage ! Ô désespoir ! La satanée quadrupède filait le parfait amour avec l’étalon des Oulad Fateh, qu’elle était allée rejoindre et auquel, paraît-il, elle avait témoigné toute l’intensité de sa frustration ! L’effrontée s’était même payée le luxe, dans sa course vers son Roméo, de traverser au grand galop le douar voisin, où on ne parlait plus que des mœurs débridées de lbeghla d’ait flane… Chouha !

Nous empruntâmes, la tête basse, des chemins détournés pour la ramener au bercail. Nous nous arrêtâmes même en route, Dieu nous pardonne, pour panser de quelques raclées les blessures de notre orgueil. Et nous nous gardâmes de dire aux femmes de la famille dans quelle boue nous avait traîné Lmaati moul lebghal.

Nous eûmes beau redoubler de vigilance, renforcer les attaches, fermer les accès, la mule trouvait, tôt ou tard, le moyen de galoper vers son étalon. Nous nous résignâmes même, soucieux de limiter les dégâts, à la devancer à chaque fois chez Oulad Fateh. Lesquels, nous témoignaient une compassion mi-figue, mi-raisin.

Cela dura jusqu'à ce que, l'honneur bafoué et l'orgueil meurtri, nous soufflions aux parents, à mots couverts, les motivations peu honorables de la mule. Ils rappelèrent Lmaati moul lebghal.

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Commentaires
L
Magnifique<br /> dur dur de lire noir sur bleu, ton sur ton mais avec un copier/coller on se régale.<br /> Le blog qui me manquait ...
T
Au lieu de "HARBATE LBEGHLA", t'auaris dû intituler ton récit "HABBATE LBEGHLA", car les les fugues de madame lbeghla n'étaient , en fait, que l'expression spontanée de son grand amour pour l'animal dial oulad fateh..finalement l 'amour à la baghlienne c pas mal non plus...bka fya ghir hadak sga3 dial coco , liyamo mchatte khssara. taygoulou: li mcha 3la chab3a lahla yraddo, a lbeghla ba3da daret ou daret 3lach temchi and lmaati, amma hadak sga3 dial coco mcha 3la khlaha.. il a du payer cher ga3 le sucre li kla ou htta li maklach..A la fin de l' hitoire je me demandais pourquoi ce fameux kidar de oulad fateh - malgré tous les risques qu'elle prenait pour le voir- n' a jamais pris la peine, de lui démontrer sa passion comme si cela n' incombait qu'aux femelles- de toutes races - de prouver leurs sentiments, alors que le male -de toutes races aussi - en était tjr dispensé?!
I
kom koi, au maroc, lbaghlates sont plus fougueuses que les kidar, mais c kan même zarb' cette notion d'honneur chez nous, qui s'étend jusqu'à nos propres b'ghal..<br /> ça me rappelle mon grand père à kénitra, où c t défendu de s'approcher des fenêtres, il avait 3 femmes, kan il voulait reclamer kek chose, il s'fatiguait même pas à parler, il sonnait avec une tite cloche en cuivre, tout le monde accourait, kan aucune femme ne venait alors il détonne : avec un AHYAAAAAAAAAAAAA enragé..alors là, c la panique..la malédiction annoncée, les femmes en tremblaient toutes ...<br /> kan on sortait au hammam, et kon rentrait peu après, le coucher du soleil..alors là..t'as une bonne s'likha en perspective,t'as déjà souillé chajra ou la3rouch.:)) désormais, le statut des femmes chez lui était pas très loin de la condition de tabgh'lite..://
R
alos ce n'est pas que chez les humains que l'amour fait commettre des folies.
N
heureusement ke je l'ai pas lu celui là au boulot, sinon ça aurait été ma chouha à moi :D<br /> bon week end
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